La nouvelle ère du brand content

Pas besoin d’avoir travaillé dans l’industrie des médias pour se rendre compte de la transformation radicale que cette activité a connu au cours de ces vingt ou trente dernières années. L’émergence des plateformes de télévision par câble et par satellite, l’avènement d’internet puis la naissance de Google, YouTube, de l’iPhone, de Facebook, Netflix – pour ne citer que quelques exemples majeurs – ont complètement changé le visage de l’industrie, entraînant pléthore d’options pour le consommateur.

Bien sûr, de nombreux autres secteurs de l’industrie ont également traversé des périodes importantes de changement au cours des deux dernières décennies (le secteur des médias d’information et de presse, de la distribution, de la musique, du voyage, des soins de santé, de l’édition), tous renforçant davantage le rôle du client.

C’est ce consommateur nouvellement habilité et averti des médias qui représente pour les spécialistes du marketing de tous les secteurs leur plus grand défi : comment réduire l’encombrement des médias, de l’entertainment et des messages publicitaires afin d’engager ses principaux clients, à une époque où le choix des consommateurs et des médias est extraordinaire ?

Steve Macallister

Maintenant, le fait même que vous lisiez cet article signifie que vous reconnaissez déjà ce défi, tout comme l’énorme opportunité que cela représente. Nous sommes à l’aube d’un tout nouveau chapitre de marque, une ère où le brand content est appelé à devenir un outil de marketing grand public. Il est vital de comprendre comment engager et divertir votre utilisateur final. Dans la nouvelle ère du contenu de marque, connaître votre public n’a jamais été aussi impératif.

En tant que spécialiste du marketing, vous connaissez bien sûr déjà votre consommateur sur le bout de vos doigts. Les énormes quantités de données que vous avez collectées vous ont permis de créer des profils clients très détaillés, qui incluent leurs préférences d’achat, leur style de vie et leurs habitudes de consommation des médias.

À cette fin, il est devenu courant depuis longtemps de se servir des données pour identifier le bon environnement publicitaire pour ses marques. Traditionnellement, cela se traduit par la définition du bon mix média (TV, presse, radio, cinéma, affichage, digital) puis par l’identification d’un contenu spécifique (par exemple une émission de télévision, un article de magazine, un film de cinéma) en phase avec le bon contexte créatif / éditorial au sein de ces médias pour sponsoriser ou placer une annonce. En effet, le sponsoring d’émissions existe depuis aussi longtemps que la télévision commerciale elle-même – les feuilletons sont l’un des premiers exemples de séries financées par des sociétés comme P&G, Colgate et Lever Brothers.

Mais comme nous le savons tous, la télévision en tant que support publicitaire simple et direct n’est plus ce qu’elle était autrefois, de nombreux téléspectateurs choisissant désormais de passer à côté des publicités ponctuelles traditionnelles via le visionnage en différé, sans compter bien sûr l’impact de la SVOD et d’autres services d’abonnement à la télévision commerciale. De ce fait, les marketeurs se déplacent au sein de la chaîne de valeur de la télévision afin de commander du contenu télévisé pour leurs propres besoins. Ils doivent acquérir à cette fin de nouvelles compétences et expertises qui leur permettront de détecter les meilleures solutions créatives.

Cette évolution nécessitera plus qu’une simple augmentation du budget marketing : un changement d’état d’esprit s’avère nécessaire, qui entraîne une nouvelle culture et le besoin de structures et de processus organisationnels innovants pour conduire ce nouveau domaine de la créativité. Cela nécessitera également une approche de la création de contenu qui permettra aux éléments créés d’être réadaptés pour une utilisation à toutes les étapes du cycle de vie du client et sur différents médias (par exemple, un contenu taillé à la cible et « snackable » lorsque vous envoyez des e-mails directement à vos clients). Avec des ressources suffisantes, la construction de bibliothèques de contenu modulaires sur mesure aidera à maximiser cette adaptabilité à travers les différents canaux de distribution et les étapes du cycle de vie client.

Ainsi, pour vraiment prospérer dans ce nouveau monde, les équipes marketing devront identifier, développer, commander et investir dans des projets créatifs à un stade précoce de pré-production. Et si cela ne suffisait pas, ils devront également se familiariser avec la myriade d’options de distribution disponibles pour diffuser leur contenu auprès des personnes qui comptent – et au bon moment pendant le cycle d’achat. Il existe bien sûr une grande variété d’options disponibles, en plus d’intégrer le contenu sur les pages de destination pertinentes du site web de la marque.

Les réseaux et médias sociaux (Facebook, Instagram, Youtube) sont probablement le moyen le plus ciblé d’atteindre les principaux consommateurs. Ces plateformes permettent aux marques de créer des communautés de clients irréductibles et doivent constituer un élément clé de toute stratégie de distribution de marque. Les éditeurs indépendants tels que BuzzFeed peuvent également être un vecteur de distribution très efficace sur plusieurs réseaux sociaux. Cependant, il y aura toujours un élément « tu prêches un converti » avec cette approche et, bien que le facteur viral soit toujours un élément clé pour répandre davantage le mot, d’autres voies devraient être adoptées si vous essayez de gagner des parts de marché.

Un partenariat avec un groupe mondial d’agences de publicité (par exemple WPP, OMD, Publicis, Interpublic, DentsuAegis) sera une étape naturelle pour beaucoup, car ces grands réseaux d’agences ont certainement un poids mondial auprès des chaînes télé, des réseaux câblés et des plateformes en raison du volume d’annonces qu’ils achètent chaque année, et peut-être encore plus important, ils sont passés maîtres dans le ciblage d’audiences précisément définies.

À l’autre extrémité du spectre des agences, les marques devraient envisager de s’associer à l’une des nombreuses agences de marketing digital indépendantes qui ont vu le jour ces dernières années. Ce faisant, vous tirerez parti de cultures hautement entrepreneuriales et créatives, dont beaucoup seront en mesure de fournir une gamme complète de services, en particulier pour des solutions plus finement ciblées.

L’alignement avec un réseau câblé mondial (Turner, NBC, Fox, BBC, Viacom, Discovery) – dans le cadre d’un achat média optimisé – est l’une des voies les plus directes si la marque produit son propre contenu, mais cette approche sera naturellement limitée par la distribution, la démographie et la pénétration de (de la) chaîne(s) en question.

Alternativement, un partenariat sur la base d’une coproduction est un bon moyen d’accéder à l’extrémité « premium » du marché du contenu (par exemple, une fiction), mais vous ferez alors peut-être partie d’un syndicat d’investisseurs – dont l’un sera susceptible d’être un distributeur international – et le maintien de l’attribution de la marque pourrait devenir un problème en fonction de la composition de ce syndicat.

Enfin, travailler avec un distributeur de contenu télévisuel traditionnel pourrait fournir une voie viable vers le marché pour certains – bien que, la majorité travaillant dans une logique de maximisation des frais de licence (le plus souvent sur la base d’une commission), cette approche pourrait aboutir à une audience plus large et donc moins bien définie. Toutefois, dans le cas où un public plus large était précisément ce dont vous auriez besoin, le distributeur devra d’abord être convaincu que le contenu pourrait être solide d’un point de vue créatif et commercial pour prospérer sur le marché international.

Cela nous amène au point crucial : pour obtenir un retour sur investissement fort sur le marché d’aujourd’hui, les marques devront prendre le soin extrême dès le départ de créer un contenu qui dispose avant tout d’une forte intégrité créative et authenticité. Dans les environnements de contenu déjà encombrés d’aujourd’hui, il s’agit du seul moyen d’offrir à votre contenu une chance de se démarquer.

Ne vous y trompez pas, des consommateurs engagés seront essentiels dans un paysage de plus en plus concurrentiel. Et dans un environnement où la toile de fond est celle d’une « méga-consolidation » sans cesse croissante des médias et des retailers, la stratégie de distribution sera vitale pour que les spécialistes du marketing prospèrent dans ce nouveau chapitre passionnant.

*Steve Macallister est un conseiller média indépendant avec une perspective unique sur le secteur du contenu mondial. Il a occupé des postes de direction internationale dans un large éventail d’entreprises qui façonnent l’industrie. Steve a été directeur général d’All3Media International (deux fois lauréat du Queens Award for Enterprise in International Trade), la branche de distribution internationale du groupe de production multimédia All3Media. Auparavant, il était PDG de Zodiak Rights, la division d’exploitation des droits du groupe Zodiak Media. En tant que président et directeur général, ventes et distribution mondiales chez BBC Worldwide (le plus grand exportateur mondial de programmes de télévision en dehors des studios d’Hollywood), il était membre du conseil exécutif de BBC Worldwide. Au cours de son mandat, Steve a réalisé six années consécutives de croissance des bénéfices à deux chiffres. Avant de rejoindre la BBC, il a occupé le poste de vice-président principal et directeur général Asie-Pacifique chez The Walt Disney Company, où il a géré les droits de télévision de la société dans la région pendant six ans, multipliant par trois les revenus pendant cette période. Steve a commencé son mandat de 14 ans chez Disney en tant que membre de l’équipe pionnière de la syndication du troc en Europe de l’Est. Steve a commencé sa carrière dans les médias dans le secteur de la publicité au Royaume-Uni et a occupé des postes chez Young & Rubicam, Lintas et chez les spécialistes de l’achat média CIA.

Texte traduit de l’anglais par Luciana Uchôa-Lefebvre